Street art et notes de frais
Ce vendredi, dans le XIIIe, il est notamment question d'art urbain, de tickets de caisse et de solidarité. Bon Vendredi 13 !
Vendredi, il est 13h – Vous lisez le nouveau numéro de Vendredi 13, la newsletter indépendante du XIIIe arrondissement de Paris.
Au sommaire cette semaine :
++ Street art : « L’effet d’accumulation nuit aux artistes » (Claude Degoutte)
++ Des conditions de travail dégradées à la BnF ?
++ Les notes de frais du maire
++ Que faire cette semaine ?
++ À lire ailleurs : la revue de presse
Street art : « L’effet d’accumulation nuit aux artistes »
Ancien journaliste et réalisateur de films publicitaires, Claude Degoutte accompagne la scène « street art » parisienne depuis ses débuts avec son appareil photo. Auteur de plusieurs livres dans lequel il compile ses nombreuses photographies, Claude Degoutte — alias @10000pas sur Instagram — écume toujours la capitale et le XIIIe pour repérer de nouvelles oeuvres. Nous l’avons rencontré à l’occasion de la parution de son nouvel ouvrage, Paris Street-Art — La mémoire des lieux, publié aux éditions Omniscience.
Vendredi 13 : Le street art est aujourd’hui présent dans de nombreux quartiers de Paris. Mais quand et où est-il né ?
Claude Degoutte : Il y a eu, à Paris, deux précurseurs de l’art urbain : Gérard Zlotykamien, qui a dessiné dès 1963 des formes noires sur les murs de la ville, et Ernest Pignon Ernest, qui a installé en 1971 une œuvre hommage à l’épisode de la Commune sur les marches menant à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre.
Une autre figure est l’artiste Blek le Rat, qui a eu l’idée d’adopter la technique du pochoir, rapide et qui permet de multiplier les œuvres. Il habitait dans le XIVe arrondissement où il a beaucoup travaillé. Le street art a ensuite essaimé dans les années 80 sur les palissades du chantier du musée Beaubourg et vers Stalingrad, où il y avait à l’époque un important terrain vague très prisé des graffeurs [haut lieu de l’émergence du hip-hop, aujourd’hui disparu]
Quand avez-vous commencé à vous intéresser à cette scène ?
J’ai commencé à faire de la photo en 1977 et comme j’habitais le XIVe, je me suis vite retrouvé à photographier les débuts de l’art urbain. En tant que journaliste, j’y ai aussi consacré un certain nombre d’articles, comme dans Photo revue, BaT ou encore Pilote, pour qui je me suis intéressé aux liens entre street-art et bande dessinée.
Où le street art s’épanouit-il aujourd’hui à Paris ?
Le XIIIe arrondissement a une scène importante reconnue. Le maire, Jérôme Coumet, est un grand amateur de street art et a donc développé une politique assez laxiste en matière d’enlèvement des œuvres, en premier lieu à la Butte aux Cailles. Les artistes savaient qu’en travaillant là-bas, leurs travaux allaient rester.
Ensuite, avec la galerie d’art spécialisée Itinérance, des artistes internationaux ont été invités à s’exprimer sur les murs des tours du boulevard Vincent Auriol. C’est ce qui fait de cette partie de la ville celle où il y a le plus d’œuvres de taille XXL.
Il y a eu également au début des années 2010 l’épisode de la Tour 13, promise à la démolition, qui a pu être investie un temps par des artistes. Enfin, vous avez aujourd’hui, sous le périphérique, le Spot 13, qui est comme un « musée à ciel ouvert ».
Qui sont les artistes majeurs du XIIIe ?
Dans le XIIIᵉ, il y avait Esse Erudiorff dont je parle dans Paris Street-Art — La mémoire des lieux. Il posait des œuvres dans le quartier chinois, dont certaines sont encore en place. Vous avez bien sûr également Miss. Tic, qui est décédée l’année dernière. Différents artistes lui ont d’ailleurs rendu hommage. Certains de ses pochoirs sont encore visibles, avec parfois des choses bizarres : il y en avait un très beau sur une pizzeria rue Samson. Ils ont voulu ouvrir le mur et ont cassé la moitié de l’œuvre.
Le street art parisien fait désormais l’objet de nombreux guides et également de visites guidées. Que voulez-vous apporter avec votre dernier livre ?
Dans ces guides et visites, ce sont souvent les mêmes grands artistes renommés qui sont mis en avant. À l’inverse, avec ma veille journalière de tout ce qui se passe, j’aime mettre en avant les œuvres de jeunes qui débutent.
La deuxième idée est de ne pas s’adresser seulement aux personnes qui s’intéressent déjà au street art mais à tous ceux qui veulent en savoir plus sur la ville.
Dans votre livre, vous insistez en effet sur la notion d’art « in situ ». Pouvez-vous expliquer ce que vous désignez avec cette expression ?
Il y a aujourd’hui un foisonnement d’œuvres « street art » dans les différents quartiers de Paris. En multipliant leur présence, les artistes veulent rapidement s’imposer. Or je trouve que cet effet d’accumulation, comme ce que l’on voit à la Butte aux Cailles, nuit aux artistes. C’est pourquoi j’ai trouvé que l’idée d’œuvres uniques, entrant en résonance avec le lieu dans lequel elles sont installées, pouvait être intéressante.
Pour illustrer cela dans le XIIIe, vous parlez notamment du street-art qui s’inspire de la Bièvre.
L’association Les Lézards de la Bièvre fait appel chaque année à des artistes pour intervenir sur les murs du XIIIe ainsi que du Ve arrondissement. Cette année, l’artiste invité n’a pas exploré la thématique de la Bièvre. Mais en 2022, Oji avait élaboré tout un parcours dans lequel l’eau était très présente.
L’association a également été chargée de l’aménagement des murs sous les ponts qui relient le XIIIe et le Ve. Sous le pont Pascal, les artistes Babs, Keyone et Socrome ont livré en 2017 une série de fresques poissonneuses. Sous le pont Broca, ils ont travaillé sur un autre thème, celui des Contes de la rue Broca de Pierre Gripari. Un éclairage, qui passe du jaune au rouge, nous plonge dans une sorte de train fantôme.
— Claude Degoutte sera en dédicace le 9 septembre à la galerie de street-art Lavo//matik (20 bd du Général d'Armée Jean Simon). Il exposera ses photos en octobre à la bibliothèque Glacière - Marina Tsvetaïeva (132 rue de la Glacière).
Des conditions de travail dégradées à la BnF ?
À en croire son rapport d’activités 2022, publié le 5 juillet, tout va bien au sein de la Bibliothèque nationale de France (BnF). L’année dernière aura ainsi été marquée par « un niveau inédit » du nombre d’abonnés et par la « réouverture éblouissante » du site historique Richelieu. Si ce même rapport se félicite des « grands projets » réalisés, il fait pourtant l’impasse sur l’important mouvement de grève mené mi-2022 par l’intersyndicale CGT-FSU-SUD contre une réorganisation des services souhaitée par la direction. Une opposition soutenue alors par de nombreux acteurs du milieu universitaire et culturel.
Le même rapport n’évoque pas non plus la question des conditions de travail du personnel de la BnF. Pourtant, une étude récente interne fait état d’un malaise persistant. « Après le suicide d’un agent sur le site François Mitterand en août 2020, le CHSCT avait soulevé beaucoup de questions sur les conditions de travail. Dans ce contexte et poussée par les syndicats, la direction a décidé de réaliser une nouvelle enquête auprès des agents », déclare Catherine Patureau de la CGT-BnF à Vendredi 13. Un exercice dont le précédent remontait à… 2011.
Selon les résultats rendus publics par la CGT, un agent sur quatre estime que ses conditions de travail se sont « dégradées » ces dernières années. 41% des agents ayant répondu à l’enquête font état de stress et près de 60% d’entre eux « travaillent au-delà de leur cycle de travail » avec une explosion du nombre d’heures non récupérées. « Beaucoup de collègues restent tard le soir ou emmènent du travail à leur domicile. Cela s'explique par les grands projets que nous devons mener alors que les suppressions de postes ont été nombreuses. Quand on perd 300 postes, ça se ressent », souligne Catherine Patureau. Une situation qui pourrait empirer avec les prochains arbitrages budgétaires. « Les négociations, qui doivent aboutir à l’automne, sont en cours, et nous avons quelques craintes », conclut la syndicaliste.
Les notes de frais du maire
La mairie du XIIIe va-t-elle rendre publiques les notes de frais du maire Jérôme Coumet ? Pour rappel, ces notes « constituent des documents administratifs, communicables à toute personne qui en fait la demande », selon une décision du Conseil d’État, rendue après une longue bataille juridique entre un journaliste néerlandais, Stefan de Vries, et la Mairie de Paris. Pour le XIIIe, c’est un certain « M. Rio » qui a envoyé une demande, le 13 juin dernier. Alors que l’administration dispose d’un délai d’un mois pour communiquer les documents, rien ne semble avoir bougé du côté de la place d’Italie. Contactés par e-mail ce mercredi par Vendredi 13, le chef de cabinet et le directeur de la communication de la mairie n’ont pas réagi.
Que faire cette semaine ?
Si de nombreux établissements commencent à fermer pour les congés d’été, il y en a un qui ouvre ses portes à partir du 20 juillet : le Quai de la photo. À retrouver dans notre sélection subjective des choses à faire ce week-end et les jours suivants :
La Bretelle : Free Patrie — Tous les genres de la musique électronique sont réunis (chill, zouk, house, techno, garage, dub…) pour une session « open air » / Adresse : 13 rue Jean-Baptiste Berlier (le 14 juillet à partir de midi)
Les Amarres : Sapongue Collectif — DJ set 100% house avec Mickel Hengel, DJ Ketchup Afro, DJ Dralex et DJ Konu / Adresse : 24 quai d'Austerlitz (le 15 juillet à partir de 16h)
Digital Village : La Terreirada — Soirée brésilienne avec cuisine, projection de courts métrages, le groupe Roda de Samba et DJ Rao / Adresse : 21 rue Albert Bayet (le 15 juillet à partir de 18h)
Stade Charléty : Championnats du monde de para-athlétisme / Adresse : 1 avenue Pierre de Coubertin (jusqu’au 17 juillet)
Petit Bain : Cameron Avery — L’artiste multi-instrumentiste australien, bassiste du groupe psychédélique Tame Impala, est accueilli sur la péniche pour un concert gratuit / Adresse : 7 port de la Gare (le 19 juillet)
RueWATT : Suspension et danse verticale — La fabrique artistique pour la rue, le cirque et l’espace public propose des stages gratuits la semaine prochaine. Objectif ? Une représentation dans le cadre des JO 2024 ! / Adresse : 18 rue Watt (les 19 et 20 juillet à 18h30)
Compagnie à l’Affût : La cabane à histoires — Spectacle gratuit pour toute la famille de contes et musiques du monde d’aujourd’hui / Adresse : Jardin Clara Zetkin (le 19 juillet à 18h) & Place de Vénétie (le 21 juillet à 19h)
Quai de la photo : Ouverture officielle — Le nouveau « centre d'art flottant dédié à la photographie contemporaine » ouvre ses portes ! Et il accueille l’exposition « Life’s a Beach » du photographe brittanique Martin Parr / Adresse : 9 port de la Gare (à partir du 20 juillet)
Kia Vu : Exposition participative — Radio Olympiades organise une exposition collaborative de photographies des Olympiades. Clichés à envoyer avant le 16 juillet / Adresse : dalle haute des Olympiades (à partir du 20 juillet)
Lavo//matik : 58e édition de l’exposition « Murs Ouverts » — La galerie dédiée au street art regroupe une cinquantaine d’artistes pour la 58e édition de l’exposition collective / Adresse : 20 bd du Général d'Armée Jean Simon (jusqu’au 29 juillet)
À lire ailleurs
Le premier mort des JO 2024 (Mediapart) : Etendu des deux côtés de la Seine, dans le XIIIe et le XIIe, le chantier du quai d’Austerlitz — qui doit améliorer la qualité de l’eau du fleuve pour le rendre baignable — a connu un drame le 16 juin dernier. Amoura Dioumassy, maçon et chef d’équipe âgé de 51 ans, y est décédé après avoir été percuté par une camionnette qui faisait marche arrière. En cause, de nombreux manquements aux normes de sécurité. « Rien n’était fait, il n’y a que le rendement qui compte », déplore Lyes Chouai, délégué syndical central CGT de la Sade, filiale de Veolia.
Déstigmatiser la distribution (Le Monde) : Tel pourrait être le slogan de l’association Linkee qui vient en aide aux étudiants précaires. Dans les locaux du bar associatif ESS’pace (15 rue Jean Antoine De Baïf), une ambiance amicale et musicale accueille les bénéficiaires qui viennent chercher aliments mais aussi vêtements, livres ou objets du quotidien. « Les étudiants sont de plus en plus nombreux à se tourner vers nous : ils n’arrivent plus à manger », observe Julien Meimon, président de Linkee.
Enquête sur un « parachutage » (Huffpost) : La députée de la 9e circonscription de Paris, l’écologiste Sandrine Rousseau, est au centre d’une enquête ouverte début juin et confiée à la Brigade de répression de la délinquance faite aux personnes. Cette enquête fait suite à une plainte déposée par la militante EELV Claire Monod. Candidate malheureuse à l’investiture pour les législatives de 2022, elle accuse Sandrine Rousseau, qui lui a été préférée, d’avoir établi un faux certificat pour justifier d’un domicile dans le XIIIe.
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